Local commercial et copropriété : quelles contraintes pour le locataire ?
Les particularités du bail commercial en copropriété
Le bail commercial est un contrat qui régit la mise à disposition d’un bien immobilier à un locataire souhaitant y exercer une activité commerciale, artisanale ou industrielle. D’une durée minimale de neuf ans, à laquelle s’ajoute le droit au renouvellement, ce contrat offre une stabilité essentielle pour installer et pérenniser une activité économique. Il protège les intérêts des deux parties en présence : le bailleur bénéficie de garanties sur l’utilisation de son bien, tandis que le locataire peut développer son activité dans le local en échange du versement d’un loyer.
Dans le cas d’un local situé en copropriété, des spécificités s’ajoutent à cette relation contractuelle.
En effet, la vie en copropriété implique des relations entre les différents occupants de l’immeuble, qu’ils soient propriétaires ou locataires, particuliers ou professionnels. Les locataires de locaux commerciaux doivent respecter les règles collectives inscrites dans le règlement de copropriété, qui s’imposent à tous les occupants de l’immeuble. À eux de faire en sorte de limiter les nuisances sonores, olfactives ou visuelles pour maintenir une cohabitation sereine au sein de la copropriété.
L’importance du règlement de copropriété
Document fondamental, le règlement de copropriété vise à garantir la jouissance paisible des parties communes et privatives. Pour préserver l’harmonie de l’immeuble, il peut limiter ou interdire certaines activités commerciales considérées comme nuisibles, telles que les restaurants, les bars ou les ateliers de fabrication artisanale trop bruyants.
Avant de signer un bail commercial, il est donc important de le lire pour vérifier la conformité de l’activité envisagée avec les dispositions du règlement de copropriété. Un locataire exerçant une activité incompatible pourrait être contraint de cesser son exploitation, ce qui entraînerait des conséquences financières et juridiques importantes.
Les acteurs clés de la copropriété
Le syndic joue un rôle central dans la gestion quotidienne de la copropriété. Il veille au respect du règlement, gère les relations entre copropriétaires et locataires, et agit en tant que médiateur en cas de litiges. C’est également à lui que revient la mission de contrôler les travaux et de s’assurer de leur conformité.
L’assemblée générale des copropriétaires constitue l’organe décisionnel majeur. Elle est sollicitée pour valider des décisions importantes, comme l’autorisation de travaux d’aménagement dans un local commercial, l’ajustement de certaines dispositions du règlement de copropriété, la programmation de travaux dans les espaces partagés…
Charges locatives : la répartition prévue au bail commercial
L’article L.145-40-2 du Code de commerce, issu de la loi Pinel (loi n° 2014-626 du 18 juin 2014) vise à encadrer la répartition des charges entre le locataire et le bailleur dans les baux commerciaux pour éviter les abus.
Les charges non récupérables par le bailleur
En vertu de cet article, les charges, impôts et redevances, liés à la propriété du local, doivent toujours être pris en charge par le bailleur. Il s’agit :
- Des dépenses relatives aux gros travaux de réparation au sens de l’article 606 du Code civil qui touchent la structure de l’immeuble comme la toiture, les fondations ou les murs porteurs. Les honoraires associés à la réalisation de ces travaux sont également à la charge du propriétaire.
- Du coût des travaux nécessaires en raison de la vétusté du bien ou de sa mise en conformité avec la réglementation, lorsqu’il s’agit de réparations ou d’aménagements importants.
- Des honoraires liés à la gestion locative par le bailleur ou le syndic,
- Des impôts, redevances et taxes dont le bailleur est redevable comme la Contribution économique territoriale (CET). La taxe foncière, la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, la taxe de balayage sont, en règle générale, à la charge du propriétaire, mais elles peuvent être imputées au locataire si une clause spécifique le stipule dans le bail.
- Des charges liées aux locaux vacants ou celles imputables à d’autres locataires.
Les charges imputables au locataire
En revanche, les charges locatives, également appelées charges récupérables, sont des dépenses engagées par le bailleur mais qui peuvent être refacturées au locataire, sous réserve qu’elles soient conformes aux dispositions légales et aux mentions inscrites au contrat de bail.
La loi impose au bailleur de fournir un inventaire des charges locatives, détaillant leur nature et leur répartition, au moment de la signature du bail commercial. Ce document doit inclure :
- Une description des charges prévues.
- Les modalités de leur répartition entre locataire et bailleur.
- Les régularisations éventuelles en fin d’exercice.
Les charges locatives concernent notamment :
- Les consommations courantes telles que l’eau, le gaz et l’électricité des parties communes,
- L’entretien régulier du local et les petites réparations, incluant les travaux sur les peintures, revêtements muraux, moquettes, appareils de chauffage, compteurs, sanitaires et volets extérieurs.
- Les travaux d’embellissement dont le coût dépasse celui d’un simple remplacement de l’élément concerné.
- Les charges liées aux équipements collectifs de la copropriété, comme la maintenance de l’ascenseur, le nettoyage des parties communes, l’entretien des espaces verts.
Chaque année, le bailleur est tenu de transmettre au locataire un récapitulatif des charges, accompagné d’un décompte de régularisation. Il doit le faire au plus tard le 30 septembre de l’année suivant celle à laquelle ces charges se rapportent. Dans le cas des immeubles en copropriété, ce délai est réduit à trois mois après la présentation des comptes annuels de la copropriété.
Focus sur les charges de copropriété
Le Code de la copropriété distingue les charges générales, réparties selon les millièmes attribués au lot concerné dans le règlement de copropriété, des charges spéciales, calculées en fonction de l’utilité que chaque équipement ou service représente pour un lot.
Les charges générales concernent l’entretien et l’administration des parties communes de l’immeuble. Le règlement de copropriété attribue à chaque lot une quote-part exprimée en millièmes ou en centièmes par rapport à l’ensemble de l’immeuble. Elle sert de clé de répartition pour les charges générales.
- Nettoyage des halls et couloirs.
- Entretien des escaliers, toitures et façades.
- Réparations mineures des parties communes.
- Assurance de l’immeuble.
Les charges spéciales sont liées, quant à elles, à l’utilisation des équipements collectifs ou des services spécifiques. Elles sont réparties entre les lots des copropriétaires qui bénéficient de l’équipement concerné.
- Entretien des ascenseurs, portes automatiques, ou systèmes de climatisation.
Par exemple, les frais d’entretien de l’ascenseur sont supportés uniquement par les lots situés aux étages. En revanche, s’il dessert un ou plusieurs sous-sols, l’ensemble des lots est concerné, la charge devient alors générale. - Chauffage collectif et production d’eau chaude.
- Entretien des espaces verts ou parkings communs.
La réalisation de travaux dans un local commercial en copropriété
En tant que locataire d’une cellule commerciale, si vous souhaitez réaliser des travaux dans votre local, votre premier réflexe doit être de vous référer à votre bail commercial et au règlement de la copropriété.
Les travaux d’embellissement à l’intérieur du local
Un commerçant est libre de réaliser des travaux de décoration et d’aménagement à l’intérieur de son local dès lors que ceux-ci :
- Ne modifient pas la destination des lieux : les travaux ne doivent pas transformer un local commercial en local d’habitation, par exemple.
- Ne portent pas atteinte à la structure de l’immeuble ou à son aspect extérieur.
- Sont conformes au bail commercial. En général le bail commercial contient une clause qui interdit au locataire d’effectuer des travaux de transformation, notamment s’ils touchent le gros œuvre, sans accord préalable et écrit du bailleur.
Les travaux impactant les parties communes d’un immeuble en copropriété
Lorsque les travaux affectent les parties communes ou la devanture d’un immeuble en copropriété, l’autorisation du bailleur, ainsi que celle de l’assemblée des copropriétaires, sont indispensables.
C’est le cas pour les travaux suivants, par exemple :
- Modifications structurelles : perforation ou suppression d’un mur porteur, ajout de cloisons affectant la structure,
- Modifications extérieures : installation d’une enseigne, d’une devanture commerciale, ou d’une climatisation visible depuis l’extérieur,
- Aménagements techniques : ajout ou modification de conduites d’eau, de gaz ou d’électricité passant par des parties communes, installation d’un interphone,
- Occupation temporaire des parties communes : installation d’échafaudages ou stockage de matériel dans le hall ou la cour pendant les travaux.
Après avoir eu l’accord de son bailleur, avant d’entamer les travaux, le commerçant doit soumettre sa demande au syndic de copropriété. Elle devra détailler les plans des travaux envisagés, une description précise des impacts sur les parties communes ainsi que les assurances souscrites pour couvrir d’éventuels dommages. Le syndic présente la demande lors de la prochaine assemblée générale des copropriétaires, ou convoque une assemblée extraordinaire si les travaux sont urgents.
Le projet est alors soumis au vote. Pour les travaux affectant l’usage ou l’aspect des parties communes, une majorité absolue est requise. Pour des modifications importantes, comme l’autorisation d’usage exclusif ou des travaux d’envergure, une double majorité peut être nécessaire.
Une fois cette étape passée, en fonction de la nature des travaux envisagés, le commerçant devra déposer une déclaration préalable de travaux ou une demande de permis de construire.
Retrouvez les détails de ces formalités dans notre article Travaux dans un local commercial : vos démarches administratives.
La location d’un local commercial en copropriété nécessite une compréhension approfondie des spécificités du bail et des règles qui régissent la vie collective dans l’immeuble. Respecter le règlement de copropriété, comprendre la répartition des charges locatives, connaître les autorisations à obtenir avant d’engager des travaux, sont autant de prérequis pour exploiter de façon pérenne et sereine son local.
Texte de référence
https://entreprendre.service-public.fr/vosdroits/F32336
En matière de droit commercial, il est important de noter que chaque situation est unique et que les démarches peuvent varier en fonction des circonstances spécifiques. Il est donc fortement recommandé au commerçant de consulter un professionnel du droit pour obtenir des conseils et une assistance adaptée à son cas particulier.